PRODUCTIONS FRANÇAISES EN FLEURS
Le salon FlorEvent fait dialoguer la filière
par Claire Nioncelil y a 6 mois5 min de lecture
Mathilde Duperret, directrice de Falabella, allie paysage et floriculture. A FlorEvent, elle témoignait aux côtés de Gilles Rus, de la Sica Marché aux fleurs d’Hyères, et de Romain Joubert, fleuriste lyonnais qui s’approvisionne en fleurs locales et de saison.
L’édition 2025 de FlorEvent, à Eurexpo Lyon, a été marquée par une conférence fédératrice intitulée « Demain, refleurir en France ? », soutenue par l’interprofession Valhor. L’objectif était de montrer, avec une dizaine de professionnels du secteur, comment la filière peut s’engager collectivement face à la réalité d’une économie mondialisée.
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« On ne veut pas opposer la fleur française à la fleur étrangère mais plutôt valoriser la place de la fleur française et réfléchir à son avenir », a commencé Anne-Marie Frapard, directrice de FlorEvent, salon de la fleuristerie qui s'est tenu cette année à Eurexpo Lyon, à Chassieu (69), les 16 et 17 mars. La conférence sur les fleurs françaises, « Demain, refleurir en France ? », le 16 mars en soirée, a accueilli plus de 150 participants, producteurs, fleuristes, porteurs de projets, représentants du secteur et médias spécialisés. « Nous avons voulu dresser un état des lieux sur les possibilités et les enjeux du marché français. »
Alors que le sujet de la production de fleurs en France nourrit les débats médiatiques et le « rose-bashing » (accablement de la rose), les professionnels de la filière ont décidé justement d’en faire le sujet de leur échange. « Neuf fleurs sur dix seraient importées, d’après FranceAgriMer (…). Produire est polluant et exporter est polluant. Nous sommes tous conscients de l’impact écologique de nos activités », a rappelé Franck Prost, fleuriste et journaliste horticole qui animait la soirée avec Manuel Rucar, tendanceur chez Chlorosphère.
L’élan est venu des États-Unis, en 2018, avec le mouvement Slow Flower. « Aujourd’hui, selon le tendanceur, la France compterait près de 500 fermes florales, sur 2 000 m2 environ. On peut en vivre, mais c’est un véritable challenge à relever et il faut être formé. » Ce que détaille Stéphane Salmon, directeur du Centre national de promotion horticole-Piverdière (49) qui a récemment enrichi son offre de formations en y intégrant un programme dédié à la floriculture en France.
Des innovations en fleurs et en modèle d’entreprise
Des fleuristes ont témoigné de leur volonté de développer un approvisionnement en fleurs françaises, en lien avec les producteurs locaux et des innovations constantes mises en avant durant la soirée par Élise Vendeuvre, responsable R&D et qualité chez Ernest Turc, producteur de bulbes en Maine-et-Loire.
Romain Joubert, fleuriste à Lyon, fait partie des premiers en France à revendiquer depuis cinq ans l'utilisation exclusive de fleurs locales et de saison tout au long de l'année, avec seulement 30 à 40 % en provenance d’Italie du Nord. « Notre clientèle est jeune et dynamique et vient pour la fleur de saison », insiste le jeune fleuriste.
De son côté, à Saint-Vulbas (01), Mathilde Duperret, directrice de Falabella, a réussi à créer, il y a deux ans, un nouveau modèle pour la floriculture à partir du secteur du paysage, autour de Lyon. « J’installe de la production florale sur quinze parcelles chez mes clients, uniquement en fleurs de saison. Je ne déroge pas au principe écologique donc je n’ai pas de production toute l’année. Je suis paysagiste et éleveuse et pratique aussi l’écopâturage. La diversité des recettes fait que mon entreprise est viable », ajoute la cheffe d’entreprise, entourée déjà de onze salariés.
Ne pas opposer les marchés
Gilles Rus, directeur du développement de la Sica Marché aux fleurs d'Hyères (83), l’un des principaux pôles de commercialisation de fleurs coupées en France, précise que « le Var, qui produit plus de 40 % de la production française, avec 190 millions de fleurs chaque année, génère aussi 90 % des exportations de fleurs françaises ». Tout cela pour témoigner « qu’on ne peut pas opposer les modèles, les uns aux autres ».
« Ce n’est pas parce que l’approvisionnement vient de l’étranger qu’il n’a pas de valeur, et ce n’est pas parce qu’il vient de France qu’il sera automatiquement bien », complète Denis Moinet, gérant de l’entreprise Moinet et Fils, installé à Niort (79). « Nous avons besoin de tous nos producteurs. Nous ne serons pas, en France, en capacité de produire toutes les fleurs que demande le marché, tient-il à rappeler. Certes, 85 % de l’approvisionnement du fleuriste – de la fleur commercialisée en France - est issu du marché européen ou international (…). Le rôle de l’interprofession est justement de ne pas opposer cette filière d’import de production internationale et la filière française. Chacun doit cohabiter avec la réalité d’un marché mondialisé. »
Et le responsable professionnel ajoute : « Le consommateur reste notre donneur d’ordre et il nous faut répondre à ses attentes . » Il rappelle aussi que ce qui fait la force des producteurs français, « ce sont de petites unités de production, avec en moyenne 3 à 4 ETP pour chacune d’entre elles. Ce qui fait aussi leur agilité ».
Florent Moreau, président de Valhor et lui-même fleuriste, rappelle que l’interprofession s’inscrit dans une démarche de continuité, de la production au grossiste, jusqu’à l’artisan fleuriste. « Il est nécessaire que chacun garde la place qui est la sienne avec le niveau d’expertise qui est attendu. »
Il tient également à souligner qu’« avoir la main verte ne suffit pas pour se lancer dans ces métiers qui demandent tout un savoir-faire et une technicité, avec des niveaux de connaissances élevés. Nos métiers exigent passion, mais aussi beaucoup de professionnalisme », termine-t-il.